2 Janvier 2024, je sors du bureau et j’aperçois l’un de nos premiers sacs à dos, le Granite. Il se déclinait en deux versions, à partir de kayaks gonflables en fin de vie ou de tapis d’escalades réformés. Sa propriétaire le porte particulièrement bien, ça me donnerait presque envie de relancer une production…
Dernier prototype cousu par Benoît et Maxime avant le lancement de la production.
Me reviennent alors les maux de ce sac et ceux de tête qu’il nous provoquait.
Une belle occasion d’enfin mettre des mots sur tout ce qu’on a appris avec ce premier produit et pourquoi on a choisi de l’arrêter.
1 - Confronter nos convictions
Quand nous démarrons, nous sommes fortement inspirés par des marques telles que Hopaal, Loom, Asphalte ou encore La Vie est Belt. Responsabilité environnementale, production raisonnée, co-construction de la marque et communication radicale nous attirent.
Nous écrivons alors : Développer et distribuer de la bagagerie locale à impact positif, sans compromis sur le style ni la qualité.
Le premier bureau La Virgule, Rue Royale à Lille.
Cela passe évidemment par l’upcycling de produits outdoor, mais également par des choix forts en production. Nous cherchons activement un atelier d’insertion ou ESAT (établissement employant des personnes en situation de handicap) qui soit prêt à relever le défi avec nous. Sans historique, nous rencontrons des difficultés pour qu’un atelier nous suive, puis nous rencontrons un ESAT à Calais, l’atelier du Détroit.
Avec un atelier couture bien dimensionné, ils sont partants mais découvrent la fabrication d’un sac à dos.
Nous imaginons alors créer avec eux un vrai partenariat, une montée en compétence progressive et simultanée pour arriver au résultat escompté, soit un sac technique et durable fabriqué à partir de matériaux upcyclés.
2 - Le temps des doutes
Les mois passent et la qualité espérée n’arrive pas.
À l’image de toute marque qui débute, nous avons vendu un projet, une vision. Avec 150 sacs pré-vendus sur Ulule en juillet 2019, nous estimons à notre échelle avoir réussi notre pari, avec un positionnement intéressant et des produits qui plaisent.
Le lancement de production à l’atelier de Calais.
Notre communication s’est axée évidemment sur la revalorisation de déchets, mais également sur la durabilité de nos produits. Cette dernière peine à suivre.
En fait, nous en demandons trop à l’atelier qui ne peut pas tout faire à la fois.
Les couturières sont formées pour de la couture moins contraignante, les machines ne sont pas adaptées et il manque d’investissement pour combler ces lacunes.
Pourtant, la responsable d’atelier couture y met toute son énergie et sa patience. Elle fait souvent des miracles, mais notre marque ne peut reposer sur la compétence d’une unique personne.
3 - Faire des choix
Nos doutes se concrétisent, et les premiers mails de clients tombent. Le défaut principal est la bretelle qui lâche…
C’est logique d’un point de vue technique car c’est l’endroit avec le plus d’épaisseurs en couture, et les machines de l’atelier, le fil et les aiguilles utilisées sont sous-dimensionnées.
Cette première erreur nous permet d’apprendre beaucoup sur la relation client et le SAV mais elle nous coûte cher. Entre le coût de rapatriement des produits, le temps de réparation et le renvoi, la marge de nos produits s’est envolée.
Heureusement, nos clients sont formidables, croient en nous et font toujours preuve de sympathie et de patience.
Pour être pertinent dans la réponse que nous apportons au problème que nous voulons résoudre avec La Virgule, nos produits doivent être cohérents sur toute la ligne. Nous devons travailler avec chaque entreprise et les gens qui la composent pour ce qu’elle fait de mieux. Notre combat est de rendre l’outdoor circulaire, et nous le faisons en revalorisant de la matière première en sacs techniques.
4 - Redimensionner notre supply
Notre ambition est et a toujours été d’industrialiser l’upcycling, de rendre le monde du sport et de l’outdoor circulaire.
Nous savons parfaitement que nous aurons de l’impact en revalorisant un maximum de matières, donc en étant capables de produire et de livrer des produits techniques, désirables et surtout dont la qualité surpasse celle d’un produit conventionnel.
2020, l’heure du confinement. Toute l’équipe est dispatchée à droite à gauche et nous en profitons pour prendre du recul et capitaliser sur l’expérience des débuts.
Nous développons notre nouveau sac, le Duffel Bag 35 litres. Cette fois-ci, nous savons que nous n’avons pas le droit à l’erreur, la qualité doit être irréprochable. Si notre premier sac était notre ‘savoir-être’, le gage de nos valeurs, le suivant doit être celui de notre ‘savoir-faire’.
Pour un produit qui dure, des machines adaptées à la bagagerie sont indispensables.
Nous choisissons donc de confier la tâche à un atelier expert dans la bagagerie technique, une référence en Europe. Cet atelier, nous le trouvons au Portugal, au sud de Porto. Un atelier familial qui depuis est devenu notre premier partenaire de production, avec une qualité dingue. Dès lors, les retours des clients sont élogieux sur les produits et notre capacité à accélérer dans l’impact s’en trouve démultipliée. Certes, nos matières premières parcourent plus de kms qu’avant, mais c’est largement compensé par la durée de vie du produit final et sa qualité (étude d’impact en cours).
5 - Une production locale relancée, un impact fort
Si le pari des sacs à dos techniques fabriqués à quelques kilomètres de chez nous n’a pas été concluant, nos partenariats avec les ateliers locaux n’ont pourtant pas cessé, au contraire.
La préparation des matières premières se fait à Tourcoing, Marcq-en-Baroeul et Calais dans des ESATs et ateliers d’insertion avec des centaines d’heures de travail chaque année.
Nos housses vélos, bananes et autres accessoires sont toujours produits à Lille et Calais avec une qualité canon! La grosse différence par rapport aux sacs à dos, c’est que ces produits sont cohérents avec le savoir-faire et l’outillage dont ces ateliers disposent. On ne les remerciera jamais assez pour toute la valeur qu’ils nous apportent.
Voilà, vous en savez plus sur notre aventure, nos débuts et nos déboires qu’on sera toujours prêts à partager en toute transparence. Toutes nos décisions sont prises avec une équation assez simple qu’on vous dévoile ci-dessous :
La Virgule = (Meilleur produit pour nos clients)*(Impact environnemental le plus faible)*(Ateliers de fabrication qui respectent l’humain)
Mais comme ce n'est pas une vraie équation, on peut simplifier ça en disant que de A à Z, on donne le meilleur de nous-même chaque jour.
Benoit Gourlet - CTO - Surfeur, vadrouilleur ascendant apiculteur.